Avec ma mèche peroxydée, veste de la RATP et pulls troués, je suis le premier (et seul exemplaire) punk du lycée. Au ciné-club, on prête des caméras super-8 et de la bobine. Vingt ans avant le 'scandale' Cronenberg, je décide de tourner un film inspiré de Crash!, et embauche Dantec dans le role de Vaughan, le neuro-chirurgien fou. Pendant des semaines, on va hanter les casses de la nationale 7, les garages, les échangeurs d'autoroutes. Je filme des chats écrasés, Mo se masturbant sur le cuir d'une Citroen SM de 73, Marc vomissant dans la carcasse d'une Chambord. Nous passons nos nuits dans un bar à bière de l'ile St Louis, au TapeCul, ou viennent nous rejoindre Jacno et ses Stinky Toys. Marc sort avec une strip-teaseuse de Pigalle, et on va la chercher à la fin de sa tournée, au Tamaris ou au Folie's, armés de cuir noir et de lunettes Velvet. Vers 5 plombes du mat', on croise souvent un Eudeline blafard dans le seul resto de hamburgers de Paris, le Wimpy's. Mon film, avec sa bande-son originale des Stooges, de Suicide et de Pere Ubu, scandalise un parterre de féministes qui assoit définitivement ma réputation de martien déjanté.
En 1977, le mouvement se radicalise. On est fascinés par Baader et Mesrine. On rejoint la grande manif anti-nucléaire de Creys-Malville au son des Sex Pistols, après avoir envoyé un texte commun, 'Comment garantir le caractère violent de la Manifestation de Creys-Malville', qui sera publié par Libé. On écume les concerts : Clash, Jam, Cherry Vanilla et Wayne County au palais des Glaces, Iggy Pop à Pantin, Johnny Thunder et les Heartbreakers, Dave Vanium & the Damned. L'idée de fonder un groupe de punk rock ultra-violent nous obsède, mon pote Marc et moi-même.
Fin novembre, le projet se concrétise. Maurice se décide, et on se réunit dans la cave du pavillon de banlieue de son père, à Nogent sur marne. Le groupe s'appelle alors Etat d'Urgence. Quelques semaines après sa formation, Jean Ternisien nous rejoint, et notre premier concert a lieu dans l'amphi N de l'université de Tolbiac, au milieu d'une manif. On joue nos quatre morceaux cyberpunk (RAF Propaganda, Sans Contrôle, Massacre à l'Electrode, Brigade Interférences), puis on s'enfuit avec le matos pourri avant les charges de CRS.
Quelques temps plus tard, autre concert organisé dans un squatt d'autonomes, se termine en baston généralisée.
Voici ce qu'en raconte Jean-Eric Perrin, alias Johnny Gueule d'Amour, dans Rock'n folk :
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Moi-même au concert des Damned (in Punkitudes, Albin Michel 1978)

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Dantec dans mon film adapté de Crash!

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Concert de Clash, Jam, Wayne County et Cherry Vanilla au Palais des Glaces

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Affiche d’un de nos premiers concerts